Viens voir les comédiens, voir les musiciens, voir les magiciens : chronique des sorties.
Des plaisirs et des bornes
Samedi 22 septembre.
KM 0 : Ougy. C’est à 20 heures. Va falloir passer prendre Gérard et Marie-Ange, aller à Saint-Boil, trouver le Grenier des Chailloux. Il pleut, il fait froid, si ça se trouve, ça gèle, roule doucement mon amour.
KM 12. On a trouvé, on se gare devant, c’est toujours bien ça, y a toujours de la place. On pousse la porte, on est chez les Fournet, qui nous sourient, on monte au premier par un brave escalier de bois. Devant nous, des alignées de chaises pliantes, avec des gens, assis,
debout, on se regarde, plus ou moins ouverts, plus ou moins fermés, plus ou moins à l’aise. Ca commence, on est là, une cinquantaine, et sur la scène surgit un type, Michel Hermon, qui se met à chanter, Léo Ferré, Baudelaire, Verlaine, ses « compagnons d’enfer », comme il
dit…Avec son pianiste, il nous emmène, un coup par l’épaule, un coup par les tripes, nous serre le cœur, nous balance dans les étoiles, faut refouler un peu les larmes qui montent, mais c’est du bon, du plaisir, du profond. A la fin, au milieu des bravos, on entend un « merci ». Et voilà la maîtresse de maison qui vient aussi nous remercier, et elle aussi elle est émue, disons qu’elle aussi elle pleure, mais c’est de la bonne émotion. C’est fini, on repart, il pleut toujours. Dans la voiture, personne ne dit rien. On est tous des grands poètes.
Jeudi 8 novembre.
KM 0 : Ougy. C’est à 20 heures 30, à Cortambert, au foyer rural. Faut passer par Massilly ? KM 13. On se gare devant (il y a de la place). Le foyer, c’est un foyer, pas beau, haut de plafond, froid. Mais les femmes qui nous accueillent ont des grands sourires, et dans un coin,
il y a une tarte aux noix pour tout à l’heure, qui a l’air…On s’installe sur les trois rangées de gradins. Devant nous, une scène. Sur la scène, une femme, Martine Schambacher, qui nous emmène dans des textes de Ramuz (c’est un Suisse, non, Ramuz, tu connais ? Jamais rien lu
de lui, paraît que c’est bien…). Et nous voilà tous dans la montagne, et dans la vie de braves gens, des comme il n’y en a plus, des qui disent bonjour les blés, bonjour la forêt, et qui se souviennent quand ils faisaient l’amour, sur la mousse, dans la clairière. Dans la grande salle un peu froide, personne ne dit rien, on est tous avec cette petite comédienne blonde qui est là, avec sa montagne posée devant elle, dans laquelle on se sent bien, nous aussi.